vendredi 18 mai 2018

Un An (et quelques mois) de Nintendo Switch

L'autre nuit, alors que j'étais tranquillement installé dans mon lit en train de jouer à Bayonetta 2 sur une console portable en buvant du jus de pamplemousse, j'ai réalisé que la Switch est l'une des meilleures consoles de l'histoire.

Pourtant il y a encore un an, j'avais vraiment peur qu'elle se plante. Le public perdait foi en Nintendo après l'échec cuisant de la Wii U et l'accumulation constante de décisions éditoriales incompréhensibles, et malgré toute la bonne volonté de ses fans, la firme ne pouvait pas se permettre de manquer son coup avec sa nouvelle machine.

A son annonce, le concept de la Switch paraissait incroyable, mais même si Nintendo semblait avoir appris de ses erreurs passées, le risque de flop n'était clairement pas écarté. Lancement raté, catalogue vide, technologie à la ramasse, gimmick envahissant... Il restait bon nombre de pièges sur leur chemin, et j'ai attendu le lancement de la console avec autant d'enthousiasme que de terreur.

Alors que la Switch est un incroyable succès commercial un an et quelques mois après sa sortie et qu'un nouveau Super Smash Bros. est sur le point d'être dévoilé à l'E3, je pense qu'on peut non seulement considérer que la console est une réussite, mais surtout un miracle qui a su repropulser Nintendo au top.

Un miracle, et une merveille qui a une place toute particulière dans mon cœur.

Car la Switch a réveillé quelque chose en moi que je n'avais pas retrouvé depuis l'époque de la Wii il y a 10 ans. Quelque chose d'important dans ma relation à l'art, et quelque chose qui me permet d'apprécier le jeu vidéo au maximum: Je me permets à nouveau d'être curieux.


Alors que nous nous trouvons dans la 8ème génération de consoles et que l'industrie du jeu vidéo évolue constamment autant en bon qu'en mauvais, la Playstation 2 reste de très loin ma console préférée.

Malgré les innovations et l'expérience, aucune compagnie n'a réussi à battre la quasi perfection de la machine de Sony qui, en plus d'assurer sur un plan technique, possède un catalogue hallucinant, une mine d'or de pépites plus ou moins populaires.

L'une des plus grandes forces de la PS2 fut sa variété. En accueillant un nombre incroyable de jeux "middle-shelf", des titres aux budgets moins hauts que les jeux AAA First Party mais aux ambitions tout de même conséquentes, elle s'est composée une galerie de jeux originaux, différents, et attirant tous les types de joueurs, ce qui en a fait un énorme succès, et la parfaite console du touche-à-tout.

Sly Cooper, Persona, Ratchet & Clank, God of War, Gran Turismo, Final Fantasy, Kingdom Hearts, Metal Gear Solid, Zone of the Enders, Devil May Cry, Shadow of the Colossus... La liste est absolument énorme. Sony a su se construire un éventail d'exclusivités leur donnant une avance monstre cruciale sur la concurrence, avec autant de jeux à grand spectacle qui repoussaient les limites des graphismes de l'époque que d'œuvres originales et mémorables qui ont construit le jeu vidéo tel que nous le connaissons.

J'aime m'essayer à tous les genres, et même si ma collection PS2 n'est pas aussi imposante que d'autres, je m'en suis servi comme d'un tremplin pour développer au maximum mes horizons et construire le joueur que je suis aujourd'hui. J'aime cette console d'amour pour la qualité de ses titres, leur nombre, et leurs différences, et c'est pour cette même raison que j'adore la Wii.


Si on passe au dessus de l'idée que la Wii est une simple console familiale avec un gimmick grand public pleine de party games et qu'on creuse un tout petit peu, on trouve un filon de titres exclusifs étranges, des titres dont la créativité embellissent un catalogue déjà bien rempli de chefs-d’œuvre First Party Nintendo.

C'est la plate-forme qui a accueilli No More Heroes, Pandora's Tower, et Little King's Story, et même si elle a aussi quelques bons bousins shovelware dans le tas, c'est sans importance quand on voit à quel point sa bibliothèque est énorme et extrêmement hétéroclite.

Mad World, Zack & Wiki, Deadly Creatures, DeBlob, Eledees... Des jeux originaux moins mis en avant qui permettent de découvrir de nouveaux horizons et d'éviter à l'industrie de stagner grâce à leurs idées chelous et leurs styles uniques.

Dans le paysage de l'industrie AAA, Nintendo a toujours répondu présent pour proposer du contenu frais et original, pour alimenter cette variété, cet amour du jeu vidéo. Bon nombre d'éditeurs tel que Ubisoft ou EA ont complètement laissé tomber le principe de jeu middle-shelf pour se concentrer sur de plus grosses sorties régulières, ou plus récemment sur ses idées de "Game as Service" assez toxiques.

Le jeu vidéo indépendant à connu un grand boom et des centaines d'artistes ont pu dévoiler leur vision au monde sans restrictions de genre ou de sujets, et si je suis ravi qu'elles existent et soient connues et reconnues, je n'en attends évidemment pas la même chose qu'un jeu d'aventure ou un shooter arcade à moyen budget, et si on oublie des miracles comme Hellblade où les jeux édités par Bethesda, leur apparition se fait de plus en plus rare dans la sphère grand public.


Personnellement, je continue à trouver mon compte. Je cherche constamment à étendre mes horizons et à aller fouiner dans les univers un peu plus niche, jeux japonais en tête, mais tout le monde n'aura pas la même curiosité, et la variété dans le domaine mainstream est essentielle.

C'est pour ça que Nintendo et sa philosophie restent au sommet, et c'est pour ça que le succès d'une console comme la Wii est important.

Mais la Wii U est arrivée. La Wii U qui s'est retrouvée à patauger et en manque de titres marquants pendant une bonne partie de sa vie. La Wii U qui fut une véritable douche froide quand on compare son catalogue à celui de son ainée, et qui a laissé un vide évident dans l'industrie.

Pendant quelques années, ce vide n'a jamais vraiment été rempli, et alors que l'industrie AAA s'uniformise ou se concentre sur un moins grand nombre de titres de haute qualité à budgets ultra élevés et que les créateurs indépendants se retrouvent privés de la visibilité et de l'accueil de Steam, actuellement en pleine autodestruction, la Switch arrive à point nommé.


J'ai rarement vu des lancements aussi réussis que celui de la Switch, et je pense que le mot "Engrenage" est un bon terme pour décrire l’entièreté de mon expérience avec elle.

Sa première année fut une suite continue de choix inspirés. Le simple fait de sortir Breath of the Wild en titre de lancement, avec son contenu et son monde immenses et ses possibilités infinies qui donnent envie de ne jamais le lâcher, témoigne d'une compréhension totale de ce qui rend la console si spéciale.

Si je n'étais honnêtement pas sûr de beaucoup l'utiliser en mode portable, ayant toujours préféré m'installer devant un écran pour de longues sessions, j'ai commencé à sortir la tablette de son dock par réflexe, et une fois l'engrenage lancé, je n'ai plus jamais pu m'en passer.

Dire que la Switch m'a fait redevenir curieux est peut-être une exagération. Je n'ai jamais arrêté de m'intéresser et d'aller voir un peu partout, mais il est évident qu'elle a ravivé en moi une forte envie d'exploration, et je me suis très rapidement emmêlé dans une boucle sans fin.

Plus je l'utilisais, plus je voulais de jeux dessus, et plus je jouais à des jeux dessus, plus je l'utilisais. Sans m'en rendre compte, je commençais à sortir ma Switch de plus en plus régulièrement pour y jouer absolument partout, et au moment où prendre ma console avant d'aller dormir était devenu un réflexe, j'ai décidé de commencer à prendre des risques.


Tout au long de l'année, Nintendo a su entretenir son catalogue avec des sorties régulières mettant bien en avant les qualités du concept hybride rendant la machine si attirante.

A chaque nouveau mois, Nintendo avait une nouveauté intéressante et différente de la précédente, et je me suis retrouvé à m'essayer à tout, à tester des genres avec lesquels je ne suis pourtant pas très familier, et à oser me laisser tenter. En découvrant l'immense collection de jeux indés que l'E-Shop avait à me proposer, ma collection s'est remplie de petits jeux arcade bien à leur place aux côtés des open worlds massifs.

Il faut dire que l'utilisation de la console, en plus d'être agréable et intuitive, m'a permis de bien mieux gérer mon temps qu'auparavant. Moins de contraintes et plus de liberté pour une expérience bien différente qui s'accorde autant aux petites sessions qu'aux longues heures d'exploration, quelque soit le type de jeu.

C'est pour ça que j'ai beaucoup de mal à comprendre ceux se plaignant du trop grand nombre de portages sans se rendre compte de leur bénéfice.


En plus de ne pas empêcher la sortie des nouveautés, les ports élargissent le catalogue avec des titres qui peuvent désormais être appréciés d'une toute autre manière, et dont la présence semble quasiment toujours cohérente.

Des jeux comme Dark Souls, Doom, Crash Bandicoot, ou Hyrule Warriors ont bien évidemment leur place sur une console portable. N'importe quel RPG, jeu à grind, simulation, jeu d'aventure, ou jeu de plate-forme à sa place sur la Switch, et se plaindre de leur portage serait passer à côté d'une galerie d’œuvres variées libérées des limites des écrans fixes, en plus d'être franchement contre-productif.

La Switch a tout. Elle a de tout pour tout le monde, de toutes les tailles et de tous les styles, et se nourrit autant de nouveautés que de succès passés pour le meilleur tout en permettant au public de découvrir des tueries à côté desquelles il serait complètement passé auparavant dans le cas des jeux Wii U.

L'E-Shop est le nouvel El Dorado du jeu indépendant, des indés qui quittent la désormais complètement submergée plate-forme de Valve pour se réfugier sur le marché bien plus sain et accueillant de Nintendo, et certains des titres ajoutés sont des choix inspirés pour ce type de console.

L'expérience est complètement différente, et acheter un jeu sur Switch représente beaucoup pour moi aujourd'hui, au point où j'ai lentement mais surement commencé à racheter des jeux de ma bibliothèque Steam sur celle-ci.


J'ai enfin pu me plonger dans Stardew Valley et découvrir à quel point ce jeu est un chef-d’œuvre, profiter pleinement de Thumper sans avoir peur d'y aller petit à petit, j'ai découvert les merveilleux Celeste et Battle Chef Brigade, et j'ai balancé de bien trop nombreuses heures dans quelques unes des plus grands œuvres de l'histoire du jeu vidéo.

Je vis une aventure avec ma Switch, une aventure que je veux poursuivre au travers de tous ces univers, et je n'échangerais une seule de ces heures contre rien au monde.

Après avoir sorti Breath of the Wild et Super Mario Odyssey dans une même année, Nintendo a bien mérité qu'on les laisse nous embarquer dans n'importe quel délire, et même s'ils ont balancé tout leur carburant en 2017, je pense que nous sommes entre de bonnes mains pour la suite.

L'arrivée imminente de Hyrule Warriors (un jeu qui a déjà prouvé à quel point il en vaut la peine sur console portable) est surexcitante, le fan de Mario Tennis que je suis n'en peut plus d'attendre Aces, et l'E3 s'annonce explosif...

Nous verrons bien ce que le futur nous réserve. Dans tous les cas, je continue de me sentir comme un gamin rêveur quand j'allume ma Switch, et à chaque fois que je démarre la console et que je vois apparaitre une news annonçant une nouveauté, je clique dessus avec curiosité, parce que qui sait... Peut-être que j'aurais envie de me laisser tenter.

Ça m'a bien réussi jusque là.


Un an après sa sortie, je suis complètement amoureux de ma Switch. Nintendo a usé de son savoir-faire pour s'assurer une année de lancement sans faute, et a rappelé au monde que malgré les dérives de l'industrie, malgré les saloperies que les clients doivent supporter et contourner, il mérite qu'on lui offre de la qualité et qu'on le traite avec respect.

Cela fait longtemps que je ne m'étais pas à ce point investi dans une console. Je passe constamment de l'indé au AAA selon mon temps et mes envies, et je me fais constamment surprendre par des expériences nouvelles ou renouvelées et ose me frotter à tous les styles en sachant que dans le pire des cas, le simple fait que je me sois ouvert à quelque chose d'inhabituel est très positif.

C'est ça la Switch pour moi. Se faire surprendre.

Je joue à plein de jeux. Trop de jeux. Des jeux par dizaines. Des jeux trop longs. Des jeux auxquels j'ai envie de jouer et rejouer, alors que je suis parfaitement conscient que je n'aurai jamais le temps de tout faire. Mais je m'en fiche. Parce que je peux les lancer quand je veux, et une session de 10 minutes ne semble jamais trop courte ou hors propos.

Je me retrouve à jouer à Bayonetta dans mon lit, à Super Mario Odyssey dans le train, à Puyo Puyo chez des amis, à Stardew Valley sur ma télé, à Sonic Mania dans l'avion, et à dédier des centaines d'heures à l'amour pur que je consacre à ce medium incroyable.

C'est pour ça que je ne veux que la Switch dans ma vie. Pas juste parce que son concept est génial. Pas juste parce que son catalogue est varié et plein de nouveautés intéressantes et de portages cohérents. Mais parce qu'elle représente tout ce qui est beau, passionnant, et fun dans le jeu vidéo.

Parce qu'elle reforme un lien intime important avec cet art si vaste et si merveilleux, un lien qu'on perd bien trop facilement.

Et malgré les faux pas, malgré les erreurs, malgré les galères, on pourra toujours compter sur Nintendo pour nous rappeler pourquoi le jeu vidéo, c'est vraiment cool.