samedi 22 décembre 2018

"Spider-Man: Into the Spider-Verse": Being Spider-Man

J'avais 6 ans quand Spider-Man 2 est sorti au cinéma, et au delà du fait que dire ça me donne l'impression d'être un bébé, je me souviens que le film avait eu un effet de dingue sur moi.

Presque 15 ans après sa sortie, dans un monde dominé par le MCU, Spider-Man 2 est toujours l'un des mes films de super-héros préférés, voire éventuellement l'un de mes films préférés tout court, et définitivement l'une des plus grandes œuvres de Sam Raimi à mes yeux.

Raimi aurait pu se contenter de ses effets révolutionnaires accompagnés de son œil virtuose pour le cadrage et la construction de l'action, mais il a réussi à aller plus loin grâce à son étude en profondeur du personnage de Peter Parker.

J'étais clairement un peu jeune pour comprendre la plupart des incidents de la vie de Peter, que ce soit ses problèmes de loyer, ses histoires au Bugle, et une bonne partie des nuances de toutes les merdes qui lui tombent dessus, et si je m'intéressais principalement au fait que c'est quand même franchement cool de le voir se balancer dans New York et taper sur des méchants super funs, je me suis identifié à son combat et au dilemme de sa double identité.

Spider-Man 2, probablement dû au fait qu'il est un excellent film, m'a fait ressentir pour la première fois l'âme de Peter Parker du haut de mes 6 ans, et a provoqué le début de mon obsession pour le personnage.

Aujourd'hui, alors que je suis un petit jeune de 20 ans, Spider-Man: Into the Spider-Verse a réveillé quelque chose en moi... Quelque chose qui a relancé mon obsession de plus belle.

Aussi longtemps que je m'en souvienne, j'ai toujours voulu être Spider-Man.



Spider-Man 2

Sam Raimi, dès le premier film de sa trilogie, a compris comment montrer Spider-Man. Le célèbre ton dérisoire du réalisateur s'est infusé dans l'univers de l'Araignée pour créer une ambiance tantôt cheesy over-the-top, tantôt terriblement noire donnant à son interprétation un côté très comic-book tirant son charme fou de dizaines de versions différentes de la franchise.

Sur le plan visuel, la trilogie a créé des standards sur comment Spider-Man doit être représenté à l'écran encore utilisés aujourd'hui, et Spider-Man 2, avec sa photo et sa réalisation absolument merveilleuses et ses scènes d'action cultissimes, est l'un des meilleurs exemples de ce que la vitesse et les mouvements du héros peuvent donner au cinéma.

A chaque visionnage, je suis frappé de voir à quel point ce film a bien vieilli. Spider-Man 2 a clairement pris un coup de vieux, et sa 3D parait souvent assez datée, mais le film est si beau, si rapide et si dynamique, et chaque effet spécial a un tel esthétisme qu'il transcende son époque et renforce sa propre identité dans le processus.

J'adore toujours autant Spider-Man 2. Il possède à mon goût une structure parfaite et un côté grandiose parfaitement symbolisé par le thème musical irremplaçable de Danny Elfman, et alors que le cinéma a beaucoup évolué et que notre façon de concevoir le blockbuster est bien différente de celle de l'époque, il sait encore être ultra divertissant. Mais c'est vraiment son histoire et la quête de Peter qui rendent le film si spécial et font qu'il est toujours tenu en si haute estime.

J'ai beau aimer tous les aspects de Peter Parker et toutes les périodes de sa longue carrière, j'ai toujours eu un faible pour ses années Bugle, le début de sa vie active, le moment où son identité secrète ne l'a jamais autant tiraillé, et où il commence à être débordé par les menaces et les responsabilités.

Bien sûr, il est facile de s'identifier au jeune Parker lycéen, un personnage conçu à la base pour permettre aux ados pas très cools de se voir dans la peau d'un super-héros créé juste pour eux, mais le Parker étudiant, celui habitué à son rôle de Spider-Man, va beaucoup plus loin que ça.

Ses problèmes, ses défaites, les dangers sont plus nombreux et plus terrifiants, et Spider-Man 2 encapsule parfaitement cet aspect du personnage en racontant la période et la décision les plus dures que Peter ait jamais eu à prendre de manière dramatique, belle, comme aucun film ne l'a jamais refait.

A 6 ans, même si certaines choses me passaient au dessus de la tête, j'ai compris cette décision. Parce que j'aurais pris la même. Je me suis identifié à Peter, comme chaque ado, comme chaque gamin, comme n'importe qui.


Si vous voulez une vitrine complète de tout ce que Spider-Man 2 accomplit, autant visuellement que scénaristiquement, et découvrir la palette de Sam Raimi par la même occasion, il suffit de regarder la scène du train.

Tout le monde connait la scène du train. Tout le monde. C'est probablement l'une des séquences les plus iconiques de l'histoire de Spider-Man, et ce pour une excellente raison.

La scène du train suinte de la patte de Raimi, avec ses bons vieux zooms et cuts ultra rapides, et ce clairement pour le meilleur. La chorégraphie est impressionnante, et toute la séquence utilise à la perfection la grande variété de capacités de Spider-Man et de Doc Oc pour créer une baston violente et terriblement euphorique.

Les déplacements dans l'espace ignorent le bon ordre des choses, avec une utilisation de la verticalité, des accélérations horizontales et des jeux d'inertie dingues. Spidey et Octopus se battent sur les murs, dans les airs, et ne laissent aucun terrain gêner leur combat, et quand l'un d'entre eux est éjecté, il se sert de son environnement pour revenir en force dans des mouvements acrobatiques assez impressionnants.

La séquence use aussi du Spider-Sense de manière intéressante, met en place des rapports de force brutaux, et permet de profiter de petits plaisirs simples, comme donner du temps d'écran à Alfred Molina, un homme suintant de charisme dont le Octopus reste l'un des plus grands méchants de l'histoire du cinéma.

Tout culmine dans l'une des séquences héroïque les plus fortes de l'histoire, quand Doc Oc met le train en vitesse maximale et arrache les commandes, forçant Peter, désormais sans masque, a le stopper par sa simple force.

Il n'est jamais certain que Peter sera capable d'arrêter le véhicule, et quand il y arrive, c'est de justesse, avec une quantité de dommages collatéraux assez élevée. Peter s'évanouit d'épuisement, et alors qu'il est sur le point de tomber, il est rattrapé par les passagers du train qui le ramènent à l'intérieur et l'allongent.

Cette scène connecte directement la population, les gens "normaux", et le surpuissant Peter, qu'ils découvrent comme étant un simple jeune homme. Quand il se réveille, les passagers promettent de garder son identité secrète, et s'interposent entre lui et Octopus, un acte purement héroïque, le même que Peter fait chaque jour en mettant le masque.

C'est à ce moment, en comprenant l'importance de l'humanité de Peter, que Spider-Man est devenu l'un des personnages les plus importants de ma vie. C'est surement aussi pour ça que j'ai été très longtemps frustré.

Cet amour pour Spider-Man ne m'a jamais quitté, mais il n'a pas été vraiment entretenu, avec bon nombre de films, de jeux, et même de comics assez ratés. Dans le meilleur des cas, je pouvais au moins profiter du côté cool et fun du personnage, mais en plus de ne pas être assez constant, ce n'était juste pas assez. J'aimais toujours Spider-Man, mais le manque était beaucoup trop fort...

Jusqu'en Septembre dernier.


Marvel's Spider-Man

2018 est une sacrément bonne année pour être fan de Spider-Man, entre le succès de Infinity War (celui de Venom aussi j'imagine, mais bleurf), la sortie de Into the Spider-Verse, et donc, celle de Spider-Man PS4.
 
Le jeu d'Insomniac accomplit tellement de choses que je pourrais passer des heures à expliquer pourquoi je considère que c'est de loin l'un des meilleurs jeux de 2018, mais c'est sa dernière heure qui m'aura mis la plus grosse claque.

Il est assez évident que personne n'a jamais aussi bien réussi un jeu Spider-Man. Les mécaniques de Web Swinging sont parfaites, et le New York dans lequel vous les utilisez est vivant, riche, et tout simplement magnifique, qui complimente le world-building incroyable décrivant 10 ans de la carrière de l'Araignée au travers des références, bâtiments importants, et personnages que vous rencontrez.

Le système de combat est tout aussi excellent, utilisant l'environnement et jouant beaucoup avec la verticalité et la flexibilité des pouvoirs et gadgets de Spidey pour créer des bastons fluides et acrobatiques qui vous feront instinctivement utiliser tout votre arsenal sans que le jeu ait à vous rappeler son existence.

Spider-Man PS4 est génial à jouer. Mais l'un de ses points les plus forts, celui qui ne veut pas me sortir de la tête depuis que je l'ai terminé, c'est son scénario.

L'histoire est passionnante du début à la fin et profite du fait d'avoir 20h de jeu devant elle pour mettre en place le plus d'éléments possibles de façon à construire ses personnages, leur philosophie, et leurs faiblesses. L'écriture est brillante, et les relations entre chaque protagoniste font vrai, et renforce le sentiment que ce Spider-Man est un héros qui a vécu au travers de l'humour et du nombre de détails dans les dialogues magnifiquement joués par des doubleurs au sommet de leur art.

Le jeu prend aussi le temps de développer l'une des plus grandes forces d'une histoire de l'univers Spider-Man, et le facteur commun trouvable dans les meilleures d'entre elles: Ses méchants sont sympathiques.

Au travers de cet élément, Insomniac permet au joueur de s'attacher différemment à des personnages qui auraient pu tomber à plat, et en leur donnant une profondeur supplémentaire, ils vous font ressentir la même émotion que Peter et vous font ainsi vous identifier à sa lutte intérieure, tout particulièrement quand la situation devient carrément apocalyptique.

Tout au long du jeu, alors que Peter doit jongler entre son boulot de super-héros habituel, mener l'enquête pour sauver la ville de l'une des plus grandes menaces qu'elle ait connue, courir après Mister Negative, et gérer ses problèmes de Peter Parker un peu fauché, il aide à la création de l'un de ses plus grands ennemis.

Alors que les Sinister Six viennent s'en mêler, il se retrouve confronté aux conséquences de sa bonne volonté, une bonne volonté qui n'aurait jamais suffit à sauver l'un de ses amis, qui va passer de l'autre côté du masque et affronter un Peter détruit essayant désespérément de le ramener sur le droit chemin.

Ceci est un petit aperçu d'à quel point Spider-Man PS4 en met plein la tronche à Peter. Toutes ses décisions, tous ses actes, entraînent plus de chaos. Pas par sa faute, il réussit souvent assez bien à s'en sortir, mais parce qu'il se trouve face à une colère, une peur, une violence si forte que rien ne pourrait changer la donne.

Il se retrouve obligé d'affronter tous les camps, autant en tant que Spidey que Peter. Il se retrouve contre des amis et des alliés, forcé à pousser sa force jusqu'à ses limites pour éviter plus de catastrophes. Et pourtant, on ne peut pas sauver tout le monde, et au moment d'arriver dans le final, Peter a déjà perdu beaucoup.


"Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités". Cette phrase, même si elle est répétée à tort et à travers, est toujours l'une des phrases les plus universelles jamais prononcée, une phrase qui encapsule tout ce que Spider-Man représente, et avec lui, ce que chacun d'entre nous représente.

Déjà enfant, même si je voyais tous les mauvais côtés, même si je me rendais compte de la pression intense sur les épaules d'un super-héros aux tels pouvoirs, je n'avais envie que d'une chose: Être à la place de Peter Parker. Pas juste parce que c'est cool, pas juste parce que c'est badass de sauter dans tous les sens à New York, mais parce que Peter est tout ce que j'aimerais être.

Si je voulais être un super-héros surpuissant, je pourrais choisir des centaines d'autres personnages, piocher dans des dizaines de milliers de comics. Peter en revanche... Peter n'a pas la même chance. Peter souffre, Peter perd, Peter est en deuil. Et résultat des courses, Peter s'améliore, et chaque jour où le simple fait d'être Spider-Man lui fait du mal, il devient un peu plus le héros que chaque être humain a envie d'être.

La dernière heure de jeu de Spider-Man PS4, d'une puissance inouïe, montre Peter à son plus bas, blessé, fatigué, émotionnellement lessivé, alors qu'il se retrouve dans une situation sans bonne conclusion où chacun des chemins sera une épreuve.

Spider-Man est le genre de gens pour qui prendre les décisions les plus dures est une évidence. Il n'a pas à aimer ça, mais il le fera quoi qu'il en coûte, car personne d'autre ne peut le faire à sa place. Alors il se bat, et alors qu'il doit faire le pire choix de sa vie, et même s'il sait que ses conséquences vont lui être éprouvantes, il prend la seule décision qui ait du sens.

Une fois le jeu terminé, malgré tout ce qu'il lui est arrivé, Peter remet le masque. A tout moment, il pourrait faire demi-tour, dire qu'il arrête tout... Mais il continue, et en étant là pour sa ville, en allant toujours un peu plus loin et en apprenant à chaque nouvelle étape, il prouve qu'il est l'un des meilleurs. Spider-Man est un héros, et Peter Parker en est un encore plus grand.

Le final de Spider-Man PS4 m'a fait un choc. Il a ravivé quelque chose en moi et m'a rappelé pourquoi j'adore le personnage et son univers, et juste quand je pensais que j'en avais terminé, juste quand je pensais que l'impact de Insomniac ne pourrait pas être égalé de si tôt...

J'ai vu Into the Spider-Verse.


Spider-Man: Into the Spider-Verse

Into the Spider-Verse est incroyable. Il n'y a pas d'autre mot pour le décrire. C'est l'un des films les plus beaux et les plus justes que j'ai vu ces 10 dernières années, et je suis sidéré par le talent mis en œuvre pour apporter une telle vision à l'écran.

Chaque seconde, chaque frame d'animation est une œuvre d'art à elle seule, avec des explosions d'effets et de couleurs dans chaque recoin, des jeux d'ombres et de lumières grandioses, et des détails dissimulés partout dans les mouvements et les textures donnant une profondeur incroyable à chaque plan. Les visuels typés comics books réussissent à éviter le gimmick et prennent sens au travers du rythme haletant et de la structure se permettant de dévier régulièrement du chemin.

Je ne peux pas assez insister sur à quel point Spider-Verse est une tuerie visuelle. Sa réalisation et son montage balancent une idée à la seconde pour offrir le même soin aux scènes de dialogues et d'action et rendre chaque séquence d'autant plus mémorable. Le film prend tellement de vitesse qu'il est impossible de tout assimiler d'un coup, mais garde le contrôle et maîtrise tellement ses intentions qu'il maintient son flow et n'en fait jamais trop, et part suffisamment loin dans son délire pour tout se permettre.

Spider-Verse est unique, et réinvente le média constamment pour s'exprimer comme il le souhaite, sans restrictions. Il transpose avec brio les univers des différents Spider-People au travers d'un character design absolument parfait et de plusieurs directions artistiques et styles parfois complètement différents venant s'emmêler sans se marcher dessus pour constituer un pot-pourri de tout ce que Spider-Man fait de mieux, et de ce que l'animation peut offrir à l'art pour créer l'un des plus beaux hommages au comic-book jamais imaginé.

Il suffit de voir la manière que Spider-Verse a de faire découvrir chaque dimension et son Spider-Man respectif en quelques secondes pour se rendre compte d'à quel point le projet est cohérent et efficace.

Le film possède une telle identité qu'il lui suffit d'un simple aperçu sur un nouveau style, une palette de couleurs inédites, et de quelques traits bien choisis pour faire assimiler toutes les informations nécessaires, et une fois la séquence terminée, ces éléments se retrouvent à chaque apparition du nouveau Spider-Man autant au niveau visuel que sonore, entre les bruits de cartoon de Spider-Ham, les effets d'anime japonais de Peni, et les jeux de contraste et de volume de Spider-Man Noir.

Au travers de ses visuels, Spider-Verse invite le spectateur dans son délire et lui fait accepter l'impossible, comme son final complètement dingue, une explosion de style possédant l'une des meilleures cinématographies que j'ai vue depuis des années. Mais ce n'est pas le seul aspect où le film excelle, et il prend aussi énormément de libertés avec son écriture.


L'écriture de Spider-Verse est absolument merveilleuse et n'hésite devant rien, jouant beaucoup avec l'humour de répétition, balançant des références, et brisant le 4ème mur sans jamais dépasser la limite du raisonnable, comme avec ses visuels, ce qui rend l'humour très varié et jamais répétitif.

Ses dialogues touchent toujours juste, et sont accompagnés d'un voice acting en or qui élève grandement le niveau et participe à ce qui rend les personnages si bien caractérisés. Spider-People, bad guys, personnages secondaires, tout le monde a au moins trois moments sous les projecteurs et laisse une impression sur la conscience.

Je suis tombé amoureux de Into the Spider-Verse. C'est un exercice de style brillant et un film ultra divertissant, drôle, intéressant, et bourré de séquences et de personnages mémorables qui a réussi à me surprendre et à aller encore plus loin que ce que j'espérais.

S'il se contentait de tout ce que je viens de décrire, il serait toujours le meilleur film de l'année, mais grâce à ses thèmes et à son traitement de l'univers qu'il adapte, il dépasse ce simple statut, devient facilement le meilleur film Spider-Man jamais sorti, et plus encore, l'une des œuvres les plus spéciales de cette décennie.

Le film n'a pas peur de montrer la noirceur du personnage et n'hésite jamais à plonger dans ses nuances les plus sombres. Spider-Man est un personnage forgé par le drame, et si chaque version présentée dans Spider-Verse a sa propre histoire, elle est passée à un moment ou à un autre par une épreuve façonnant un peu plus ses convictions et sa détermination.

Si Into the Spider-Verse possède pas moins de 6 versions différentes du personnage, il a l'intelligence de ne vraiment en mettre en avant que 3, et grâce à la manière qu'il a de montrer l'exposition et de rendre chaque personnage mémorable, se permet de donner moins de temps d'écran à la moitié des héros et de se concentrer sur les aspects uniques de leur personnalité et de leur histoire pour s'aérer sans s'empêcher de les rendre funs et intéressants.

Ceci permet aux trois Spider-People principaux d'avoir droit à un traitement plus en profondeur. Au travers de Gwen et de Peter, le spectateur découvre différentes versions du drame plus ou moins familières, mais surtout différentes manières très réalistes de le gérer.

Gwen se bloque complètement du reste du monde, abordant la politique du "Pas de partenaire", ce qui affecte aussi sa vie personnelle et l'empêche de se construire une vie sociale saine et de profiter de ce que le monde peut lui offrir, et Peter... Peter a juste une vie de merde. Son monde n'est pas détruit, son identité secrète ne lui a pas tout enlevé... La vie lui est juste arrivée.

Parfois, ça ne fonctionne juste pas. Parfois, le temps joue son rôle. Parfois, on se retrouve faible face à une situation bouleversante, si faible qu'elle nous semble impossible et qu'il ne nous reste qu'à fuir, qu'à nous refermer sur nous-mêmes, au point où l'on est incapable de changer les choses. Incapable de ne serait-ce qu'essayer.

Bien sûr, quels que soient leurs problèmes, ces gens sont Spider-Man, et comme à leur habitude, ils n'ont pas d'autre choix que de se relever, même si leur vie s'effondre autour d'eux. Peter a beau être blasé de tout, il reste bon à son job, et Gwen essaye de devenir une meilleure héroïne au travers de ses choix, même si elle en souffre d'autant plus jour après jour.

Mais il leur faudra passer au dessus pour devenir la meilleure version d'eux-mêmes, et peut-être même redevenir heureux.


Quant à Miles Morales, c'est un gamin complètement dépassé par la situation se retrouvant confronté à tous les aspects négatifs du rôle en très peu de temps, et qui voit son monde s'écrouler devant ses yeux, incapable d'y faire quoi que ce soit.

En plus d'être enseveli par son inexpérience, Miles est laissé de côté par son propre camp, un camp comprenant tout à fait la responsabilité qui lui a été confiée et son envie de faire le bien, mais connaissant aussi le danger que représente leur mission, un danger qui pourrait détruire le potentiel d'un nouveau Spider-Man.

Chacun des Spider-Man est passé par la même étape que Miles, ce moment de panique, d'isolement où personne ne peut comprendre ce qui est en train de vous arriver et où cette double identité se créé une fois avoir sauté le pas.

Découvrir qu'ils ne sont pas seuls les rassure et leur enlève une partie du poids qui repose sur leurs épaules. Malgré tout ce qui leur est arrivé, ils ne sont pas uniques, ils ne sont pas les seuls à avoir vécu les mêmes drames et à devoir se battre, et surtout, il ne sont pas les seuls à comprendre cette vie si solitaire. Découvrir ça leur fait se souvenir d'un fait réconfortant: Ils sont humains. Et avec cette rencontre, peut-être qu'ils pourront enfin recommencer à vivre.

C'est là que les thèmes du film prennent énormément de sens. Into the Spider-Verse part d'un principe simple, une idée qui alimente autant l'évolution du récit que celle des personnages: Tout le monde peut être Spider-Man s'il décide de porter le masque.

Tout se rejoint dans la scène du "Leap of Faith". La scène où Miles devient Spider-Man.

Miles saute. Tout comme n'importe quel Spider-Man qui ne sait pas si son nouveau combat sera le dernier, il se jette dans le vide, impossible de savoir ce qu'il pourrait lui arriver, s'il est vraiment capable d'endosser ce genre de rôle.

Miles saute et se découvre, s'accroche aux plus hauts bâtiments et se balance dans les rues bondées de New York. Il improvise, appréhende son environnement, s’éjecte au milieu du trafic et court contre les buildings à toute vitesse, sans jamais s'arrêter, découvre la liberté que son pouvoir lui procure, et ainsi, comprend ce qu'est sa place.

Cette scène confirme à elle seule que Spider-Verse est un chef-d’œuvre, et je suis jaloux à l'idée que mon cinéma n'atteindra probablement jamais un tel niveau. L'animation, la musique, la vitesse, le sentiment grisant qu'elle procure, le montage et la réalisation au millimètre... C'est une scène parfaite, une scène qui se mérite après tout ce que Miles a vécu, et qui donne des frissons et une motivation de malade. Elle représente tout ce que ce film a de meilleur, autant au niveau visuel que thématique.

Je pense vraiment que c'est la scène définitive de la mythologie Spider-Man. Il aura suffit de deux minutes pour résumer tout ce que le personnage est, ce qu'il représente, et le sentiment qu'il provoque.

Miles Morales ne devient pas Spider-Man au moment de se faire mordre par l'araignée, mais au moment de se jeter dans le vide. Parce que c'est ce qu'il est, parce qu'il a décidé d'endosser cette responsabilité, comme Peter ou Gwen, comme n'importe lequel des centaines de gens mordus au travers des dimensions qui ont décidé de faire quelque chose de bon pour le monde avec leurs capacités.

Il décide de ne pas faire demi-tour... Et c'est comme ça qu'il devient un véritable héros. Que n'importe qui devient un héros. C'est un saut de la foi. Il suffit de se jeter.


Le monologue final de Spider-Verse conclut ses thèmes et s'adresse directement au public. "Il te suffit d'enfiler le masque" dit Miles, l'ado qui quelques jours auparavant portait un costume discount de Spider-Man trop petit pour lui et n'arrivait même pas à se décoller des murs, aux millions de gamins, de jeunes, de moins jeunes, d'hommes et de femmes qui aimeraient changer les choses.

"That person who helps others simply because it should or must be done, and because it is the right thing to do, is indeed, without a doubt, a real superhero" cite Into the Spider-Verse dans son générique de fin en hommage à Stan Lee. Le monologue fait directement écho à cette idée, et j'espère énormément qu'il sera écouté. Pas juste parce qu'il est beau, mais surtout parce qu'il est juste.

C'est ça qui est merveilleux avec la création de Lee et Dikto, ce qui fonctionne depuis le début de Spider-Man et continue sans cesse d'évoluer au travers des formats et des histoires 60 ans après sa création, et ce qui rend Peter si intemporel. Il est la personnification de la philosophie de Lee. Tout le monde est Peter Parker.

Tout le monde souffre, tout le monde perd, tout le monde est en deuil. L'unique différence entre nous et lui, c'est que personne n'a de super-pouvoirs pour sauver le monde des super-méchants. Et le meilleur dans tout ça, c'est que cette différence n'a aucune importance. Je pense qu'on a tous besoin de l'entendre une fois de temps en temps.

C'est pour ça que j'aime Peter Parker. Et c'est probablement pour ça que j'ai toujours voulu être Spider-Man.

C'est probablement pour ça que j'y pense encore aujourd'hui à chaque fois qu'une œuvre touche juste, que ce soit Spider-Man PS4, Into the Spider-Verse, ou Spider-Man 2, et qu'à chaque fois que je me remets à la place du moi de 6 ans, je me dis que franchement, ce serait pas mal d'être Peter Parker.

Même si je sais que c'est complètement fou, même si j'ai 20 ans et que j'ai beaucoup changé depuis 2004... J'ai toujours envie d'être Spider-Man.